Un Swissroll RSS

Webmix

Commentaire de l'actualité (gaie ou non!) sur terre, au ciel, à gauche, à droite, de Genève, de Londres ou d'ailleurs
News and views (gay or not!) on earth, in heaven, left or right, from Geneva, London or elsewhere

Palestine à  l’ONU? La charrue avant les boeufs

Pourquoi la Suisse ne doit pas voter oui à  l’AG de l’ONU (réponse à  Pascal Décaillet)

Je suis présentement en vacances[1], mais méditais pour mon retour un billet à  propos du vote programmé à  l’Assemblée générale de l’ONU sur l’admission de l’Autorité palestinienne comme membre à  part entière. Je pensais partir d’une comparaison avec la reconnaissance de l’indépendance du Kosovo, sur laquelle la Suisse a été, à  juste titre, parmi les premiers sinon la première.

Eh bien Pascal Décaillet m’oblige à  avancer tout ça. Car il est tombé dans le piège de l’analogie paresseuse sans voir qu’au contraire tout ici diffère. Et d’abord la question: l’indépendance du Kosovo et l’autorité de son gouvernement sont effectives et reconnues par des dizaines d’Etats (pas même tous les membres de l’Union européenne, cependant) mais cet Etat n’est pas encore membre de l’ONU et pas près d’y être admis en raison des vetos de la Russie et de la Chine; l’Autorité palestinienne, qui jouit déjà  auprès du système onusien du statut le plus reconnu auquel un pré-Etat peut aspirer, veut plus, en violation des règles de l’ONU (c’est le Conseil de sécurité qui peut proposer à  l’Assemblée générale l’admission d’un nouveau membre[2], mais il s’agit de lui forcer la main, d’embarrasser ce brave Obama), mais surtout sans réunir encore les caractéristiques d’un Etat, ce dont témoigne de manière caricaturale la sécession de Gaza dont le Hamas s’est emparé. Cette démarche n’est pas une étape vers l’accession à  un Etat de plein droit mais une petite manoeuvre vaniteuse distrayant l’attention, doublée d’une provocation vis-à -vis d’Israël alors que la paix n’est pas encore là  et que c’est avec lui qu’elle devra bien être négociée – sans pouvoir être imposée.

La Suisse reconnaît des réalités: le pouvoir du gouvernement Mao sur la Chine continentale dès 1949, le gouvernement du Kosovo dès l’achèvement de la période de transition ouverte par la défaite de la Serbie. Comme petit Etat à  cheval sur le Droit, elle serait folle de changer de stratégie à  propos du Moyen-Orient, au détriment de ce qui importe véritablement: les conditions permettant l’existence de deux Etats vivant en bonne intelligence, l’Etat d’Israël et l’Etat de Palestine. On les connaît: le respect mutuel des exigences de dignité et de sécurité, qui passent par l’abandon pour les Palestiniens de voir Israël disparaître et l’acceptation par Israël d’un territoire viable pour l’Etat palestinien.

Il y a pourtant un parallèle pertinent, mais il est bien moins émotionnel et ne parle donc pas à  des journalistes et une opinion chauffés à  blanc en qui assimilent les Palestiniens à  des bébés phoques. Il est à  faire avec cette autre région dans laquelle la diplomatie suisse s’est engagée, non sans abnégation: le Sud-Soudan. Après une guerre atroce, un référendum d’autodétermination a eu lieu, un nouvel Etat est né, même le président Abacha l’a accepté. Et le Sud-Soudan est devenu le 193e membre de l’ONU, revendiqué comme le joyau de sa présidence de l’Assemblée générale par l’ancien conseiller fédéral Joseph Deiss. Tout est bien qui finit bien? La séparation de l’Erythrée et de l’Ethiopie incite a la prudence. Mais il y aurait aussi à  apprendre de comment la sécession du Pakistan oriental a donné naissance au Bengla Desh et conduit à  l’admission à  l’ONU de ce nouveau pays.

La Suisse, qui ne poursuit au Moyen Orient pas plus qu’au Soudan un intérêt national (comme on peut soutenir qu’elle le faisait dans son engagement au Kosovo, compte tenu de l’immigration kosovare en Suisse), mais qui en revanche s’est toujours tenue prête à  apporter son concours aux efforts de paix (en dernier lieu par son appui logistique à  l’Initiative de Genève de personnalités palestiniennes et israéliennes, déjà  quelque peu clinquant, en quoi on a reconnu la patte de Micheline Calmy-Rey), ne doit pas renoncer par obsession médiatique à  une approche factuelle et juridique. Elle devrait logiquement voter non, comme les Etats-Unis et peut-être le Canada. Je pourrais comprendre que, croyant ainsi préserver son crédit auprès de l’Autorité palestinienne sans le perdre du côté israélien, elle s’abstienne ou ne prenne pas part au vote.

Mais un Oui serait pire qu’un crime: une faute. Puisse Micheline Calmy-Rey le réaliser ou, à  défaut, le Conseil fédéral la priver de cet ultime coup de pied de l’âne [3] au moment où elle quitte le gouvernement fédéral.

COMPLEMENT DU 23.09

Notes

[1] En Israël, pour aggraver mon cas!

[2] Se rappeler que la règle démocratique du vote majoritaire n’a pas de sens à  l’ONU dont nombre de membres n’expriment que le point de vue de la dictature au pouvoir.

[3] Mon co-blogueur me fait remarquer que l’expression a un sens bien plus précis que je l’imaginais et évidemment inadapté à  la présidente de la Confédération: la vengeance des sujets qui n’ont plus peur du tyran déchu, l’âne symbolisant spécifiquement le bas de l’échelle sociale.

2 commentaires

  1. Mireille
    9 septembre 2011

    Mais que voilà  une position courageuse et réfléchie. Elles sont si rares. J’ajouterai tout de même qu’on demande à  Israël de négocier avec une entité qui comprend le Hamas, mouvement qui veut sa mort et le clame haut et fort, et une Autorité jamais claire sur la reconnaissance d’Israël. Et que de ceci, les dictatures de l’ONU, mais aussi une bonne partie de l’Europe se fichent éperdument.

  2. cramia
    9 septembre 2011

    Mais oui bien sûr, le Hamas aurait donc le pouvoir surnaturel de détruire Sionistan alors que cette entité est dotée de l’arme nucléaire sans oublier que ses amis américains et européens accourraient à  la rescousse en cas d’une supposée attaque (°°)

Les commentaires sont fermés