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Commentaire de l'actualité (gaie ou non!) sur terre, au ciel, à gauche, à droite, de Genève, de Londres ou d'ailleurs
News and views (gay or not!) on earth, in heaven, left or right, from Geneva, London or elsewhere

Enregistrement téléphonique: quand le principe de précaution peut se révéler fatal

Lorsqu’on occupe une fonction importante, délicate, exposée, est-il vraiment pendable de vouloir, par sécurité, conserver la trace de conversations téléphoniques sensibles? La vanité ministérielle manipulée par une fuite intéressée de l’intérieur de Scotland Yard fera-t-elle rouler la tête du chef de la police londonienne? Ce sont les questions qui se posent après la révélation que Ian Blair avait enregistré, notamment, un entretien téléphonique avec le conseiller juridique du gouvernement, l’Attorney General Lord Goldsmith, à  propos, ironiquement, de l’élargissement de la possibilité de produire des écoutes téléphoniques dans les procédures judiciaires, très restrictive au Royaume-Uni.

La fragilisation, après une année seulement, de Ian Blair, surtout pour un motif aussi véniel (ce serait autre chose si l’enquête en cours sur la mort d’un innocent pris à  tort pour un terroriste pendant l’été devait révéler quelque chose de grave, voire même une tentative d’étouffer l’affaire), est inquiétante surtout pour la fonction: cela confirmerait son caractère de « mission impossible » où il faut à  la fois avoir la confiance du pouvoir, celle de l’opinion (ou du moins des médias) mais également celle d’une base qui, par sa fonction, est inévitablement particulière. La contradiction est pratiquement obligatoire, on ne peut que chercher à  la dépasser. Par son obsession pour la présentation et le politiquement correct, le chef de Scotland Yard ne s’est au demeurant pas rendu particulièrement attachant: ce sont les non conformistes qui séduisent, pas les premiers de classe. Ce qui ne veut pas dire qu’il soit mauvais, loin de là . Son action pour assainir le racisme, le sexisme et l’homophobie dans la police était parfaitement justifiée et c’est une des choses que certains ne lui pardonnent pas.

On évoque les micros dont la Maison-Blanche était truffée sous Nixon (mais ce qui posait problème était surtout les preuves qu’elles apportaient de l’implication de Nixon et son entourage dans des activités illicites), on trouve le procédé indélicat (particulièrement, il me semble, parce que c’est un fonctionnaire qui l’appliquait à  l’égard d’un homme politique: l’inverse aurait-il été aussi scandaleux?). Comme toujours sans trop se demander « à  qui profite le crime », ou plutôt la fuite, et s’il y a crime quel est le préjudice, qui est la victime? Il est au demeurant déjà  établi qu’au Royaume-Uni un tel enregistrement sans avertissement du correspondant n’a rien d’illégal.

Personnellement je me suis toujours moqué du sentiment d’insécurité que me paraissait surtout révéler mes camarades étudiants qui insistaient pour enregistrer sur cassette les cours plutôt que de se contenter de prendre des notes. Mais de téléphone portable en GPS, il est clair que notre civilisation est entrée dans l’ère de la transparence obligatoire. La manière dont les Américains ont légiféré sur la conservation et l’archivage du moindre courrier électronique entre officiels est édifiante à  cet égard. Pour le meilleur et pour le pire, la traçabilité des enfants est désormais quasi-absolue, et même des adolescents ou jeunes adultes ont pratiquement l’impossibilité de rompre le cordon ombilical et de ne devoir compter que sur leurs propres forces. Sur le plan politique, il paraît simplement raisonnable de vouloir se prémunir contre la mémoire défaillante (sans même parler du mensonge ultérieur) et les malentendus et de ne pas passer à  côté d’un élément utile dans le fil d’une conversation, au demeurant strictement professionnelle.