Gordon après Tony, c’est Benoît XVI après Jean Paul II
Sept semaines, soit jusqu’au 27 juin! C’est le temps dévolu à la cérémonie des adieux à laquelle Tony Blair a donné un superbe coup d’envoi hier, et à la campagne lancée aujourd’hui, brillamment également, par Gordon Brown, en vue de devenir le nouveau leader du parti travailliste et le nouveau premier ministre britannique. Bien sûr, c’est dans tous les journaux, mais trouvez ici le texte intégral des interventions de Blair et de Brown, elles en valent la peine.
L’intéressant dans le discours de Brown, c’est combien il est blairiste sur le fond (d’une gauche frénétiquement modernisatrice, compétitive, individualiste), à côté d’un tempérament qui veut faire entendre sa différence de style (« governing in a different way, restore power to Parliament, I have never believed presentation should be a substitute for policy, I do not believe politics is about celebrity »). On disait qu’il se distancierait du New Labour, New Britain de Blair, eh bien non: la différence, c’est qu’il met une minuscule, « for me being new Labour means… ».
S’il tient la radicale transformation de comportement qu’il annonce en promettant de s’informer directement, d’écouter et de tenir compte de ce qu’on lui dit, il peut réussir le changement complet d’image d’un Ratzinger, passé littéralement du noir au blanc en succédant, modeste et bienveillant, au médiatique Jean Paul II dont il était depuis longtemps l’arrogant et sulfureux second[1]. Benoît XVI réussit en effet à rester profondément dans le sillage de son prédecesseur tout en étant très différent, et à gagner une popularité propre qu’on ne lui soupçonnait pas.
Le mystère, c’est de savoir si Brown est véritablement capable d’inspirer une équipe et non de décider en solitaire, s’il a l’instinct nécessaire et pas seulement l’intellect, car un premier ministre gère surtout l’inattendu, et s’il est capable de gagner des élections (une interrogation qui ne pèse pas sur Benoit XVI). Ces sept semaines de campagne dans tout le pays[2] avant le vote[3] des militants d’une part, des syndicats d’autre part, et enfin de la conférence qui oindra le successeur, en donneront une bonne indication.
COMPLEMENT DU 16.05 à 21h45: Ce billet a les honneurs d’une reprise sur le blog de Reporters sans frontières, où il est même traduit en anglais.
Notes
[1] C’est un remake actualisé, mais un blog ça sert aussi à peaufiner sa pensée ou son expression…
[2] Imposées même si, comme c’est possible, la « gauche » du parti ne parvient pas à trouver les 45 parlementaires nécessaires pour aligner un candidat (après le ralliement unitaire même des blairistes les plus méfiants à l’égard de Brown), en raison de la désignation simultanée du vice-leader: il y a foule pour vouloir succéder à John Prescott.
[3] Qui n’aura cependant pas lieu s’il n’y a pas de concurrent.
Et Sarkozy après Chirac, c’est Pat Robertson après Jerry Falwell. On est bien…
et pourtant Hugues tu disait qu’elle allait gagner…