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L’Europe après Chirac

Une nouvelle admirable chronique d’ Eric Le Boucher dans Le Monde de dimanche-lundi, après la pantalonnade (via Publius) de Chirac sur le traité constitutionnel:

Libéralisme et fédéralisme, monde et Europe, Jacques Chirac n’a pas les idées claires. La France non plus. C’est tout le problème, et de l’un et de l’autre. On n’en sort pas.

(…)

Sans courage, les hommes politiques de gauche et de droite font de l’Europe le père Fouettard qui impose la rigueur, la concurrence, la libéralisation, la privatisation. Les directions des sociétés nationalisées de services publics font de même: ils avouent tous en privé que Bruxelles leur sert d’indispensable aiguillon « pour faire bouger les syndicats ».

(…)

Si les Français votent non le 29 mai, la responsabilité vous en incombera directement [, M. Chirac]. A vous, aux Jospin, aux Raffarin et aux Hollande, à  tous ceux du oui qui entretiennent la confusion, depuis vingt ans, entre les responsabilités nationales et communautaires. Il leur faudrait changer du tout au tout. Dire d’abord que la mondialisation n’est pas le mal. Elle a des travers mais engendre une forte croissance mondiale qui sort de la misère des milliards d’êtres humains, notamment les affamés chinois et indiens. Les Français devraient s’en réjouir. Pour ne pas en souffrir, il faut non pas « se protéger » mais « s’adapter ». Maître-mot dont tous les autres pays ont fait leur axe stratégique.

Mais allez donc le lire en entier. Et, pendant que vous y êtes, lisez aussi « Pour en finir avec l’anti-libéralisme primaire », de Jean-Louis Labarrière, un socialiste, que j’avais raté quelques jours auparavant.

Bien sûr il reste plus d’un mois de campagne, le « non » n’est pas encore sûr (et personnellement je ne serais pas surpris que, sous un prétexte quelconque — démission de Raffarin, attentat terroriste –, le référendum finisse à  la trappe)… Mais même un « oui » français qui serait acquis dans ces conditions n’est pas rassurant: que devront penser les Néerlandais (qui ressentent l’inquiétude naturelle des « petits pays » de l’Union face à  la prétention de quelques « grands », France, Allemagne, Royaume Uni, à  jouer les directoires au sein du Conseil européen), les Polonais, sans parler bien sûr des Britanniques, d’une argumentation fondée sur l’intérêt égoïste de la France? Si la Constitution (dont Chirac raconte faussement qu’elle est une idée française alors que, sans remonter à  Coudenhove-Kalergi, elle est plutôt italo-germanique) n’est qu’une ruse pour permettre à  la France de préserver une influence excédant son importance réelle, si l’Union n’est que défense des acquis, pourquoi des sociétés ouvertes l’approuveraient-elles?

La première leçon d’un échec éventuel, c’est que le prochain traité devra décidément innover dans son dispositif d’approbation et prévoir d’être soumis à  tous les peuples de l’Union le même jour afin d’éviter ce type de discours. La deuxième, c’est sans doute qu’il vaudra mieux s’en tenir à  un traité institutionnel, les politiques restant dans les traités antérieurs. Et la troisième, c’est qu’il faudra définitivement tordre le cou à  cette idée absurde d' »Europe puissance » conçue comme un nouveau nationalisme, anti-américain, qui fait fi tant de la diversité culturelle de l’Europe que de l’intérêt commun qui est manifeste: si le monde doit être multipolaire, l’Europe et l’Amérique, avec l’Australie et la Nouvelle-Zélande ne peuvent constituer qu’un seul pôle et non deux.

En attendant on en restera au traité de Nice chiraco-jospinien! L’Europe s’en remettra, et Chirac parachèvera définitivement son entrée dans l’histoire comme le plus pitoyable président de la Ve République. Vivement Sarkozy…

2 commentaires

  1. 17 avril 2005

    Joli…Joli…Très bon billet et savoureux à  souhait sur les liens, j’ai apprécié « l’auto »critique de Labarrière…

  2. Alex
    18 avril 2005

    L’article de Labarrière est revigorant en effet. La gauche est complètement prisonnière de son double discours, pas seulement à  propos de l’économie de marché mais sur d’autres thématiques aussi, que l’on songe par exemple aux problèmes d’immigration! J’aimerais pouvoir dire qu’il y a une génération moderne et progressiste qui finira par prendre le dessus sur ceux qui n’ont pas fait le deuil de l’idée révolutionnaire: mais je crois que c’est de l’imagination. La réalité me paraît plus sombre et augurer d’une division de l’actuelle gauche en deux camps bien distincts (libéral-progressiste-réformiste et conservateur-nostalgique)!

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