Le scandale des électeurs dépourvus du droit de vote
La presse britannique d’aujourd’hui me donne l’occasion de taper sur un mes clous récurrents: le scandale de ces grandes démocraties (Etats-Unis, Grande-Bretagne, et pour le coup je suis même prêt à mettre la France dans cette catégorie, et il y en a certainement d’autres) qui n’assurent pas le caractère automatique du droit de vote.
Un rapport de la Commission électorale britannique (une autorité indépendante installée par le Parlement) le confirme: il manque 3,7 millions d’électeurs dans les registres, soit 8 ou 9% du corps électoral « réel ». Et la déformation qui en résulte est indéniable: l’étude montre des variations considérables de la proportion d’électeurs non enregistrés entre la tranche des 18-24 ans (16%) et celle des plus de 65 ans (2%), ou les Blancs (6%) et les minorités ethniques (16%, mais selon les communautés la pointe peut aller jusqu’à 37%!).
Le problème est rigoureusement le même aux Etats-Unis et en France (qui ne peut pas se réfugier, elle, derrière une allergie au contrôle étatique et à la bureaucratie); ça nous vaut, avant les grandes élections, ces campagnes civiques émouvantes menées, de manière aussi intéressée évidemment, par la gauche qui voit là une hémorragie de son électorat potentiel.
Vous me direz qu’après tout, la possibilité de s’enregistrer est bien offerte à ces gens (en Grande-Bretagne, c’est même tous les ans), voire qu’ils doivent avoir le droit de refuser de prendre part au vote. Je reconnais le droit de ne pas exprimer un vote, pas celui de renoncer au droit de vote… La titularité de ce droit ne peut pas être facultative en démocratie. Je ne vois rien d’excessif à ce que l’Etat, qui enregistre la naissance et le décès de tout individu, et quelques actes intermédiaires en passant, soit tenu responsable de l’inscription automatique dans les registres électoraux, comme c’est le cas en Suisse.
C’est maintenant théoriquement le cas en France, où l’inscription sur les listes électorales est censée être faite automatiquement à la majorité civile (18 ans). Il semble qu’il y ait quelques ratés et je pense que ça ne dispense pas le citoyen d’aller tout de même demander son inscription, ne serait-ce que parqu’il faut bien qu’il dise sur les listes de quelle commune il est inscrit.
C’est peut-être lié également au fait qu’il existe un contrôle des habitants en Suisse, avec déclaration de domicile obligatoire, ce qui n’est pas le cas en France ou aux US?
Effectivement, cela me paraît directement lié au système du « Einwohnerkontrolle ». Ainsi, l’inscription automatique est plus délicate à mettre en place lorsqu’on introduit des critères particuliers, par exemple de résidence dans le pays pour l’octroi du droit de vote aux ressortissants étrangers en matière locale. Mais avec un peu de bonne volonté, on y arrive !!
Paxa: en pratique, il faut bien noter qu’un français résidant en France et changeant de commune entre le 31/12 et la date d’une élection ne peut (au mieux) voter que dans la commune où il résidait le 31/12, et ce, malgré l’existence (très récente, il est vrai) du service national de changement d’adresse (qui ne coordonne que les fichiers des administrations et pas ceux des communes et donc, ne permet pas la révision des listes électorales). Or, certaines professions sont de fait contraintes de déménager très régulièrement, le plus souvent au début de l’année civile.