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Résultats à  Londres: l’échec d’Ed Miliband

Ken échoue à  renverser Boris, mais les travaillistes deviennent le premier parti de Londres avec 12 sièges sur 25 au GLA

Il y a eu 2,2 millions de votants (38%, une participation très suisse!).

Ce qui est intéressant, c’est de comparer la force des partis dans l’élection proportionnelle au Conseil du Grand Londres (le GLA) et dans l’élection directe du maire de l’agglomération.

Au premier tour, pour l’élection du maire, le résultat est le suivant (j’arrondis les chiffres):

Boris Johnson, conservateur: 972’000 voix
Ken Livingstone, travailliste: 890’000 voix

Jenny Jones, Verte: 99’000 voix
Brian Paddick, Lib-Dem: 92’000 voix

Siobhan Benita, indépendante: 84’000 voix (j’aurai appris que Siobhan, prénom féminin d’origine irlandaise, se prononce « Shavourne »!)
Lawrence James Webb, UKIP (souverainiste): 43’000 voix
Carlos Cortiglia, BNP (extrême droite): 29’000 voix

Pour le second tour, on ajoute aux voix recueillies par les deux premiers les suffrages complémentaires (second preferences) qui se sont portés sur eux parmi les électeurs des cinq candidats éliminés. A ce stade je n’ai que le total publié, pas le détail (les Verts ont appelé leurs électeurs à  donner leur seconde voix à  Ken, il serait intéressant de voir combien ont suivi, ainsi que la répartition des secondes préférences des Lib-Dems, en coalition dialectique avec les conservateurs au gouvernement, des souverainistes et de l’extrême droite):

Boris: + 83’000 voix, soit au total 1’055’000
Ken: + 102’000 voix, soit au total 992’000

(On le voit, les suffrages complémentaires effectifs sont loin de faire le plein de leur potentiel théorique de quelque 325’000 voix.)

Comme il se doit dans une soirée d’élection dont de surcroît les résultats tardent à  venir en raison d’incidents divers, le suspense donnait occasionnellement place à  la panique (respectivement au fantasme): et si Ken rattrapait son retard? Les pesanteurs sociologiques sont plus fortes: il a, comme attendu, recueilli davantage de secondes préférences que Boris, mais de loin pas assez pour l’emporter. (On verra demain, mais c’est probablement la principale différence avec une dissociation des deux tours, à  la française, qui permet aux électeurs de changer d’avis et aux abstentionnistes de se réveiller).

Voici maintenant la force des partis telle qu’elle ressort du bulletin destiné à  l’élection proportionnelle des 25 membres du GLA (les listes recueillant moins de 5% n’entrent pas en considération dans la répartition des sièges):

Travaillistes: 911’000 voix (12 sièges, +4)
Conservateurs: 709’000 voix (9 sièges, -2)
Verts: 189’000 voix (2 sièges, sans changement)
Lib-Dems: 150’000 voix (2 sièges, -1) –
UKIP: 100’000 voix (0 sièges, le quorum était à  110’000) – 47’000 voix en 2008
BNP: 47’000 voix (-1 siège) – il avait recueilli 131’000 voix soit 5,31% en 2008

Sept autres listes ont recueilli entre 5’000 et 39’000 voix, pour un total de 107’000 voix

Avec 14 sièges, travaillistes et Verts représentent théoriquement une majorité (portée à  16 avec les Lib-Dems dont il est peu vraisemblable qu’ils se sentent solidaires de la coalition établie sur le plan national), mais selon l’expérience suisse, sur le plan national comme dans les cantons ou communes, les choses sont rarement aussi mécaniques. Pour le reste on remarquera évidemment la promotion des Verts au rang de troisième parti (les Lib-Dems, qui sont normalement le parti attrape-tout des gens qui pontifient sans prendre de responsabilité, souffrent de leur participation au gouvernement) et l’absence de représentation à  la droite des conservateurs en raison de la division des voix entre UKIP et BNP.

Ce qui est fascinant à  observer, c’est l’effet de rémanence sur la proportionnelle de la tradition bipolaire issue du scrutin majoritaire, traditionnel en Grande-Bretagne (sous sa forme uninominale à  un tour), et applicable (sous sa forme modifiée) à  l’élection très médiatisée du maire. Je fais le pari qu’avec le temps on devrait voir un amoindrissement de la prédominance des deux grands partis au GLA, et une sorte d’égalisation entre cinq partis représentant tout le spectre de la gauche à  la droite, ce qui ne pose pas de problème dans un système « présidentiel » (indépendance entre les pouvoirs; au demeurant, comme il sied à  une administration locale, le rapport entre le maire et le GLA tient davantage du PDG au Conseil d’administration que du gouvernement au parlement).

Mais il n’en demeure pas moins que la victoire personnelle Boris Johnson est remarquable: au premier tour il fait d’emblée 263’000 voix de plus que son parti (+346’000 au total). Ou plutôt il faut souligner le désastre de la candidature de Ken Livingstone: 21’000 voix de moins que le parti au premier tour (seulement 89’000 de plus au total)…

Et c’est là  qu’Ed Miliband porte une lourde responsabilité. Contrairement à  ce qu’il veut faire croire, le bon résultat national ou au GLA du parti travailliste n’est guère redevable à  son leadership et doit tout au contexte (accentué, pour tout arranger, ces trois dernières semaines par une série noire de maladresses, erreurs et démonstrations d’incompétence du gouvernement sur des dossiers particuliers): c’est le mouvement traditionnel des scrutins intermédiaires sanctionnant le gouvernement que l’on observe en Grande-Bretagne (tant Thatcher que Blair l’ont connu, pour gagner haut la main l’élection générale deux ans plus tard). Mais c’est lui qui a fait le choix de tolérer, et même de soutenir la candidature très contestée et contestable de Ken là  où tout autre candidat aurait été à  même de faire mieux et, qui sait, de l’emporter: Boris n’a gagné que de 63’000 voix sur 2,2 millions…