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Commentaire de l'actualité (gaie ou non!) sur terre, au ciel, à gauche, à droite, de Genève, de Londres ou d'ailleurs
News and views (gay or not!) on earth, in heaven, left or right, from Geneva, London or elsewhere

Don d’organe

C’est Andrew Sullivan qui décrit le quotidien britannique que nous achetons du lundi au vendredi (le samedi c’est le FT weekend!) d’une formule cinglante: « Tory politics; tabloid news ». Aujourd’hui il publie l’histoire d’un homme de 53 ans qui a bénéficié il y a 4 ans de la transplantation d’un rein prélevé sur un donneur vivant: son épouse. Mariés depuis plus de 30 ans ils ont des enfants adultes. Mais ce qui motive l’article du Daily Telegraph c’est le fait que, pleinement rétabli et se sentant véritablement « un autre homme », il a depuis quitté pour une autre sa femme, de surcroît atteinte d’un cancer du sein (elle s’en remet courageusement). Il y a les noms, la localisation (les deux époux sont des élus locaux libéraux démocrates, l’amante est une candidate conservatrice) et dans la version papier les photos: je peine à  voir la justification par l’intérêt public (ou même du public).

Pour ma part, je vais bientôt célébrer les 10 ans de ma greffe d’un rein, prélevé sur un donneur décédé anonyme, et ce conte tragique illustre bien l’intérêt de cette pratique (qui — entre amélioration de la sécurité routière et ce qui me semble être une vénération croissante et vaguement supersitieuse des dépouilles des proches — répond cependant toujours moins aux besoins, d’où le recours élargi aux donneurs vivants dans les situations qui s’y prêtent: rein, foie, moëlle…). Je déborde évidemment de reconnaissance à  l’endroit de mon donneur (de ma donneuse?) et de sa famille qui, dans des circonstances forcément douloureuses, ont consenti à  ce que le disparu permette à  d’autres de re-vivre: et même si l’insuffisance rénale terminale n’est pas fatale, au prix d’un affaiblissement général et de dialyses trois fois par semaine, c’est tout à  fait vrai qu’après la greffe, on se sent un autre homme! Via l’hôpital, j’ai pu l’écrire anonymement à  la famille, j’espère que ce message leur sera parvenu et qu’il aura été un réconfort pour eux; je pense le refaire à  l’occasion de cet anniversaire. Mais, contrairement à  une démarche sentimalo-émotionnelle courante aux Etats-Unis, il ne me semble pas plus mal que, depuis, lors nous soyons repartis chacun vers nos vies. C’est évidemment plus dur pour ce couple, et pour le plaisir d’indigner les chaumières le Daily Telegraph n’a certainement pas rendu service à  l’épouse.