Un Swissroll RSS

Webmix

Commentaire de l'actualité (gaie ou non!) sur terre, au ciel, à gauche, à droite, de Genève, de Londres ou d'ailleurs
News and views (gay or not!) on earth, in heaven, left or right, from Geneva, London or elsewhere

Judas, alpha et omega des paradoxes théologico-philosophiques

C’est la grande mode (récurrente) de parler de Judas. Il a droit maintenant à  son évangile – cf. cet article dans le Daily Telegraph et ce billet de Phersu.

Judas a l’immense mérite d’être le support des paradoxes théologiques et philosophiques les plus classiques. Pour n’en citer que deux, il y a la double question: pourquoi faut-il condamner Judas puisque 1° il est un instrument nécessaire de la rédemption universelle 2° Jésus sait à  l’avance qu’il va le trahir, le lui dit et le révèle aux autres disciples.

La question 2° pose tout le débat liberté et déterminisme. Je ne connais pas de meilleure réponse que celle de Leibniz (qui disait commencer en philosophe et finir en théologien): De toute éternité, la notion « Judas » implique la notion « livrer Jésus » (comme la notion 5 implique la notion 2+3) – mais cela n’empêche pas qu’il le fait librement, car la définition de la liberté est (entre autres) une action sans contrainte EXTERIEURE…

On s’est aussi posé la question de la gravité comparée des crimes de Judas. Pire que la trahison, il y a son suicide, qui relève du désespoir. Or, selon une certain tradition théologique, le désespoir est le pire péché possible, le seul qui soit impardonnable puisqu’il consiste à  refuser à  Dieu la possibilité de pardonner (qui est l’essence même de Dieu). Une manière pour le Moi de se poser en dieu qui occupe toute la place.

Un calviniste n’a aucune raison de s’intéresser particulièrement à  la gravité ou à  la particularité du crime de Judas puisque le péché pour Calvin (et avant lui Luther et avant lui Paul, on reconnaît ma chanson) est un saut qualitatif et non pas quantitatif. Le péché est par définition le fait de se mettre à  la place de Dieu, les modalités pouvant varier. Le désespoir est une FORME que peut prendre le péché – et peut-être qu’on peut dire avec les catholiques que c’est la forme par excellence.

L’autre saut – qualitatif et non pas quantitatif – c’est le fait d’être sauvé (grâcié, réhabilité, adopté) qui ne dépend pas d’une décision ou d’un comportement humains. Et voilà  qui place la question 1° sous un autre jour.

A noter que le désespoir total de Jésus sur la croix (quand il crie « Mon Dieu pourquoi m’as-tu abandonné ») est cohérent avec la doctrine selon laquelle il a pris sur lui tout le péché du monde… « Il a été fait péché » Il y a même des gens qui pensent que le samedi saint, Jésus était en enfer presque au même titre qu’un damné. Mais c’est encore un autre paradoxe…