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Retour sur le "Rainbow Warrior"

Le Monde de dimanche-lundi publie un intéressant document: un récit de l’amiral Lacoste, alors patron des services secrets français, sur les circonstances de l’opération clandestine montée en juillet 1985 contre un bateau de Greenpeace qui s’apprêtait à  participer aux manifestations en vue de tenter d’empêcher la tenue des essais nucléaires à  Mururoa. Il y avait eu un mort (un photographe de presse) et la « piste française » était rapidement apparue au grand jour, pour le plus grand embarras de François Mitterrand, président socialiste de la République, et du gouvernement de Laurent Fabius: Charles Hernu, ministre de la défense, et Lacoste avaient fini limogés. Le témoignage de ce dernier éclaire la manière dont ce genre de décision se prend, dans l’informalité (Hernu prenant l’initiative et souhaitant laisser Mitterrand en dehors du coup pour le protéger, mais Lacoste se faisant confirmer par Mitterrand son accord — ce qui n’empêchera pas ensuite un grand numéro d’indignation feinte du président).

Dessin de PlantuL’affaire me permet aussi de mesurer comment j’ai été amené, en tout cas depuis 11 septembre 2001, à  évoluer sur un certain nombre de concepts, mais aussi comment je suis resté fidèle à  mes convictions politiques. La notion de terrorisme m’est maintenant beaucoup plus claire qu’elle m’apparaissait alors, à  la lumière de la lutte des Algériens pour l’indépendance ou des Palestiniens contre l’occupation israélienne, par exemple: je suis certainement devenu plus intransigeant à  son égard, c’est une limite à  ne pas franchir sous peine de perdre toute humanité. Et je ne ferais plus la confusion entretenue par ce dessin de Plantu (fantastique pour le coup de crayon, et Edwy Plenel au fond de la classe) entre une opération clandestine contre un adversaire identifié et du terrorisme, fût-il d’Etat; une telle expression devrait être réservée à , par exemple, des attentats organisés par des services secrets dans la population civile d’un pays à  déstabiliser. Dans le cas du Rainbow Warrior, Greenpeace menait clairement une action hostile à  l’Etat français, certainement illicite. Je la soutiendrais toujours, comme alors, ou 15 ans plus tôt celle conduite par Jean-Jacques Servan-Schreiber avec Brice Lalonde, le général de la Bollardière, l’abbé Jean Toulat, le pasteur Richard-Mollard et j’en oublie certainement: l’action militante exige parfois de tels actes. Il faut alors aussi en accepter les conséquences et il n’était pas illégitime que l’Etat français cherche à  se défendre; qu’il s’y soit pris maladroitement et que l’opération ait entraîné mort d’homme alors qu’on avait apparemment cherché à  l’éviter ne change pas la nature de l’opération.

COMPLEMENT DU 13.7: La fonction publique britannique a une forte tradition d’apolitisme et d’indépendance vis-à -vis du pouvoir politique, qui parfois confine au mépris de manière fort peu démocratique. Comparer le récit de Lacoste avec celui, paru dans le Guardian d’aujourd’hui, de comment Harold Wilson, alors premier ministre travailliste, se fait envoyer sur les roses lorsqu’il suggère timidement qu’il pourrait être judicieux de faire assassiner Idi Amin Dada, alors au faîte de son despotisme en Ouganda…

Un commentaire

  1. 11 juillet 2005

    De très justes remarques, que je partage pleinement. Confondre terrorisme (fût-il d’Etat) et, comme tu l’écris, « opération clandestine contre un adversaire identifié », ne peut que faire le jeu des (vrais) terroristes.

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