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Inégalité et pauvreté

Une intéressante tribune de Martin Hirsch, président d’Emmaà¼s France, dans Le Monde de samedi 23 (relevée également par Econoclaste), sur la lutte contre les inégalités, et qui revient sur la comparaison récurrente entre le « modèle français » et la Grande-Bretagne.

A ce propos, c’est dans Le Canard enchaîné de mercredi 20 que j’ai lu la réfutation de l’assertion par Jacques Chirac, le 14 juillet, que le nombre d’enfants vivant dans une situation de pauvreté serait de 17% au Royaume Uni et de 7% en France: en réalité, le critère statistique retenu dans les deux pays est différent, et si l’on prend le critère britannique (plus exigeant, comme c’est bizarre), la France est à  16%.

Mais ce qui m’a le plus interpellé, c’est le critère lui-même (car, tout journal satirique qu’il est, Le Canard se donne la peine de l’expliquer, contrairement aux quotidiens de référence qui utilisent complaisamment ce type de notions sans jamais les définir): est qualifié de « pauvre » un foyer dont le revenu est inférieur ou égal à  60% du revenu médian en Grande-Bretagne (50% en France). Or il me semble qu’une telle manière de voir définit un écart, une inégalité, mais pas la question de savoir si un tel revenu permet un mode de vie décent, ce qui me paraît le sens commun du mot pauvreté. J’ai tendance à  penser qu’il y a des populations dont la majorité vit en situation de pauvreté (ce qui est impossible avec cette définition), et d’autres (ou peut-être pas encore?) oû ce n’est le cas de personne, et cela que l’écart entre le revenu du décile le plus bas et du décile le plus haut soit très resserré ou très relâché.

Ce que je comprends mieux, en revanche, c’est que l’on utilise ce critère pour ce qu’il implique réellement, l’inégalité de revenus (sans jugement sur la pauvreté ou non), à  titre d’indicateur d’un risque de de se trouver défavorisé dans l’accès à  l’éducation, en proposant des mesures compensatoires ciblées pour ces enfants: c’est ce qu’a fait le gouvernement blairiste (suivant un modèle promu par Clinton aux USA) avec le programme Sure Start.

4 commentaires

  1. 25 juillet 2005

    Il faut rappeller aussi que le revenu « simple » est une mesure biaisée vers un certain type de société, en effet les prestations de service public au bas revenus sont en général inférieure a un prix de marché (subvention), cet effet « modèle social » devrait rentrer dans la mesure aussi, or il n’y est pas. Une créche subventionnée pour bas revenu peut avoir un effet considérable sur le revenu d’un foyer modeste par exemple.

    Je ne parlerai pas de la mesure du chomage ou du PIB et de leurs biais sous-jacents :).

    Laurent

  2. 25 juillet 2005

    Non, le seuil de pauvreté britannique (européen, en fait) n’est pas « bizarrement plus exigeant » que le français : la divergence entre les deux s’explique par des raisons techniques et historiques que l’INSEE explique très bien. Sur cette question et celle des inégalités, voir l’indispensable rapport n°33 , Les inégalités économiques, du Conseil d’Analyse Economique.

  3. vulgos
    26 juillet 2005

    « Or il me semble qu’une telle manière de voir définit un écart, une inégalité, mais pas la question de savoir si un tel revenu permet un mode de vie décent, ce qui me paraît le sens commun du mot pauvreté. »

    Oui et non. Qu’est-ce qu’un mode de vie décent? La réponse à  cette question varie suivant la richesse globale. Ce que l’on considérait un mode de vie décent au XIXè siècle ne le serait plus aujourd’hui (pas de salle de bains, pas d’eau courante, pas d’électricité, etc). Des études sur le rapport entre bonheur et revenus montrent aussi que la satisfaction d’une personne sur ses conditions économiques et sa vie en général est mesurée en rapport avec les conditions économiques de son entourage (famille, quartier). Ainsi, un chômeur dans une famille de chômeurs et vivant dans un quartier pauvre souffrira moins de sa condition de chômeur qu’une personne entourée de personnes au travail. D’autres études faites sur des singes vont dans le même sens. Les chimpanzés mesurent aussi la satisfaction générée par leurs possessions de manière relative. Ainsi, si vous prenez deux chimpanzés, que vous faites faire un exercice à  l’un des chimpanzés et non à  l’autre, et qu’à  la fin vous récompensez identiquement les deux par une banane, le chimpanzé ayant fourni l’effort se fâche et refuse la banane. Il trouve ça injuste! Pourtant, dans l’absolu, il a eu une banane… Cela démontre l’intérêt de mesurer la pauvreté de manière relative. Cela n’enlève pas l’intérêt de continuer à  avoir aussi un oeil sur les indicateurs de pauvreté absolue. Les deux formes de pauvreté doivent être réduites pour certains. D’autres sont d’accord de réduire la pauvreté absolue mais ne veulent pas entendre parler d’égalité (car, à  mon avis, l’inégalité c’est le pouvoir et ceux qui ont le pouvoir rechignent à  le céder peu ou prou).

  4. 27 juillet 2005

    Un grand merci pour ces différents compléments!

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